Exonérations

PLUS-VALUE IMMOBILIERE

RESIDENCE PRINCIPALE : QU’EST-CE QUE LE DELAI NORMAL DE VENTE ?

L’exonération en faveur de la résidence principale s’applique à l’immeuble qui constitue la résidence habituelle et effective du cédant au jour de la cession.

Sur cette dernière condition l’administration fiscale précise que « le logement doit être la résidence principale du cédant au jour de la cession ».

Elle ajoute toutefois : « Il est admis, lorsque l’immeuble a été occupé par le cédant jusqu’à sa mise en vente, que l’exonération reste acquise si la cession intervient dans des délais normaux et sous réserve que le logement n’ait pas, pendant cette période, été donné en location ou occupé gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers.

Aucun délai maximum pour la réalisation de la cession ne peut être fixé a priori. Il convient donc sur ce point de faire une appréciation circonstanciée de chaque situation, y compris au vu des raisons conjoncturelles qui peuvent retarder la vente, pour déterminer si le délai de vente peut ou non être considéré comme normal.

Dans un contexte économique normal, un délai d’une année constitue en principe le délai maximal. Cependant, l’appréciation du délai normal de vente est une question de fait qui s’apprécie au regard de l’ensemble des circonstances de l’opération, notamment des conditions locales du marché immobilier, du prix demandé, des caractéristiques particulières du bien cédé et des diligences effectuées par le contribuable pour la mise en vente de ce bien (annonces dans la presse, démarches auprès d’agences immobilières, etc.).

En tout état de cause, lorsque le délai excède la durée normale de vente, le seul fait que l’immeuble ait été mis en vente n’est pas considéré comme de nature à justifier l’exonération de la plus-value, notamment s’il apparaît que le prix demandé ne correspond pas aux prix pratiqués sur le marché immobilier local » (BOI-RFPI-PVI-10-40-10, n°190).

Il ressort de ces précisions que ;

-l’immeuble doit être occupé à usage de résidence principale au jour de la mise en vente : le cédant doit donc être en mesure de justifier l’occupation à usage de résidence principale et la date de mise en vente ;

– la vente doit intervenir dans un délai normal à compter de la mise en vente ; s’agissant de cette condition, l’administration apprécie les diligences effectuées par le cédant afin de vendre l’immeuble.

Attention : l’immeuble ne doit pas être donné en location dans cette période !

Il résulte de ces conditions que l’exonération en faveur de la résidence principale ne s’applique pas notamment ;

  • Lorsque l’immeuble ne constitue plus la résidence principale du contribuable au jour de la mise en vente,
  • Lorsque le délai pour vendre est imputable au vendeur qui est considéré comme n’ayant pas été suffisamment diligent pour vendre l’immeuble dans un délai normal.

Le juge estime en effet que « pour être considéré comme résidence principale au sens de ces dispositions, l’immeuble en cause doit constituer la résidence habituelle et effective du cédant. Un immeuble ne perd pas sa qualité de résidence principale du fait que son propriétaire a libéré les lieux avant la date de sa vente, dès lors que le délai pendant lequel l’immeuble est demeuré inoccupé peut être regardé comme normal. Il en va ainsi lorsque le propriétaire a accompli les diligences nécessaires, compte tenu des motifs de la cession, des caractéristiques de l’immeuble et du contexte économique et réglementaire local, pour mener à bien cette vente dans les meilleurs délais à compter de la date prévisible du transfert de sa résidence habituelle dans un autre lieu ».

Ainsi, il a été jugé ;

  • CAA Versailles 2 juillet 2024, n°22VE026161.

Pour un immeuble occupé jusqu’au 28 décembre 2015 et cédé le 7 juin 2017 ;

. S’agissant des mandats :  M. B… produit un mandat de vente conclu le 17 décembre 2015 avec l’agence Embassy Service, si ce n’est que ce mandat n’avait pas été retourné signé, un mandat de vente du 24 mars 2015, réitéré en septembre 2015 et décembre 2015 avec un prix de cession revu à la baisse, conclu avec l’agence Century 21, qui a attesté avoir effectué deux visites les 7 et 15 avril 2015, et un mandat de vente conclu le 16 novembre 2014 avec l’agence Bosetta Immobilier, expiré le 15 novembre 2015, qui n’a pas été renouvelé.

. Si M. B… soutient que les caractéristiques du bien en cause, un appartement bourgeois de prestige, d’une surface de 250 m², situé dans le 17ème arrondissement de Paris, en très bon état, correspondent à un  » marché de niche « , il ne justifie pas de difficultés particulières pour commercialiser ce bien. Par ailleurs, il n’est pas établi, ni même allégué, que le contexte économique et réglementaire local ou des motifs particuliers, personnels ou familiaux, auraient fait obstacle à la vente de ce bien dans un délai raisonnable.

Conclusion : alors même que le prix demandé n’aurait pas été initialement surévalué, le requérant ne peut être regardé comme ayant accompli les diligences nécessaires pour mener à bien la vente dans les meilleurs délais à compter du transfert de la résidence principale. Par suite, M. B… ne pouvait prétendre au bénéfice de l’exonération prévue au 1° du II de l’article 150 U du code général des impôts.

  • CAA Lyon 21 mars 2024, n°22LY01512

Mme A a quitté sa résidence principale en février 2011 pour s’installer avec son compagnon à Lyon. Elle n’occupait plus cette habitation à titre de résidence principale à la date de la cession, le 5 juillet 2013, alors qu’elle a mentionné l’adresse de ce bien comme étant le lieu de sa résidence principale pour l’établissement de l’impôt sur le revenu et de la taxe d’habitation de l’année 2013.

. S’agissant des mandats de vente : Mme A… a mis en vente son chalet le 4 décembre 2010. Elle soutient avoir accompli les diligences nécessaires en confiant la vente de son bien à trois agences immobilières dès décembre 2010. Elle l’a mis en vente auprès d’une troisième agence immobilière que le 9 juillet 2012 et le prix qu’elle a proposé à la vente au 4 décembre 2010 était supérieur d’environ 340 000 euros au prix de cession d’un chalet voisin de même superficie vendu par sa sœur en juin 2010 six mois après sa mise en vente.

. Difficultés liées au marché : Si Mme A… soutient que le prix de son chalet a été déterminé par un professionnel de l’immobilier, le faible nombre de visites de son chalet aurait dû l’inciter à réviser à la baisse le prix de vente proposé. Si la requérante fait état de difficultés propres au marché local en s’appuyant sur la circonstance que seulement six ventes concernant des biens immobiliers comparables ont eu lieu entre 2010 et le 5 juillet 2013, elle n’apporte pas de précisions sur le nombre de biens comparables mis en vente. Eu égard à ces circonstances, le délai de vingt-neuf mois écoulé entre la mise en vente et la cession du chalet ne peut être regardé comme normal.

  • CAA Marseille 1er février 2024, n°22MA00036

Mise en vente à un prix excessif, baisse du prix trop tardive, difficultés liées au contexte économique non justifiées, pour un déménagement en février 2012 et une vente en juin 2015. Exonération refusée.

  • CAA Versailles 8 mars 2023, n°21VE03104

Déménagement en mars 2013, pour une cession en octobre 2017.

. Sur le marché immobilier : La requérante ne démontre pas que le marché immobilier local connaissait des difficultés particulières en 2013 pour la vente d’un tel bien en se bornant à produire des articles de presse traitant de la crise immobilière survenue en 2008 et les mutations immobilières portant sur des biens vendus à proximité.

. Sur les mandats : … En outre, il est relevé que, dès 2009, Mme A… a donné mandat à une ou deux agences immobilières pour procéder à la vente de son bien. Le prix de vente, initialement fixé à 2,7 millions d’euros en 2009, a été ramené à 2,5 millions d’euros en 2011, soit près de deux ans après la mise en vente de ce bien. Il a été maintenu à 2,47 millions d’euros entre 2012 et 2015, soit pendant près de 3 ans, avant une nouvelle baisse, à 2,38 millions d’euros, intervenue au cours de l’année 2016. Le bien a finalement été vendu pour une somme de 2,29 millions d’euros à la fin de l’année 2017. Si la requérante se prévaut d’un courrier de l’agence immobilière Barnes du 26 octobre 2009 indiquant une  » fourchette haute  » de prix à 2,8 millions d’euros ainsi que d’une attestation de l’agence immobilière Feau du 30 octobre 2009 suggérant un prix de présentation à 2,7 millions d’euros  » afin de pouvoir obtenir la meilleure offre possible « , cette dernière attestation ajoute que le prix du bien avait été estimé entre 2,2 et 2,5 millions d’euros et que ce bien correspondait  » à la demande des clients actuels  » de cette agence. Ainsi, le prix initial, qui était supérieur de 17,9 % au prix de cession et qui dépassait l’estimation de la valeur du bien faite par l’agence Feau, a été réduit trop lentement, restant notamment inchangé pendant trois ans, entre 2012 et 2015, à un niveau encore supérieur de 7,86 % au prix de cession. Par ailleurs, le prix d’acquisition de ce bien n’étant que de 960 868 euros, Mme A… n’avait pas de nécessité de maintenir un prix de vente aussi élevé. Si l’estimation de ce bien était difficile en raison de son caractère particulier, il ressort des mutations immobilières produites que des pavillons situés dans le voisinage, ne constituant certes pas des hôtels particuliers mais d’une surface de 240 m2 à 363 m2 avec terrain, ont été vendus à des prix largement inférieurs, entre 956 500 euros et 1 360 000 euros.

Exonération refusée.

  • CAA Marseille 16 février 2021, n°19MA04636

Immeuble occupé jusqu’au mois de juillet 2010, cédé en septembre 2013. Après avoir signé un compromis de vente le 26 mai 2010 dont les effets ont été prorogés par des avenants successifs avec un futur acquéreur qu’il a autorisé à occuper la villa à titre onéreux à compter du 30 juillet 2010 et jusqu’à la réalisation de la vente, qui n’a cependant pas eu lieu, M. A… a remis le bien en vente, l’acquéreur pressenti renonçant à l’achat le 5 mai 2011 mais ne quittant les lieux que le 24 septembre 2011.

M. A… a conclu des mandats de vente avec des agences immobilières à compter du mois de mai 2011, les prix de vente étant parfois augmentés au cours de la période et s’établissant entre 1,8 million et 2 millions d’euros. Toutefois, l’importance des travaux entrepris pour valoriser le bien et justifier cette augmentation du prix demandé n’est pas établie et, en tout état de cause, la période des travaux ne peut être retranchée, pour l’appréciation des diligences accomplies par le cédant, du délai pendant lequel la villa est restée inoccupée dès lors qu’aucun élément ne justifie de leur intérêt pour permettre la vente rapide du bien immobilier.

En outre, même si ce bien vendu le 2 septembre 2013 pour la somme de 1 532 600 euros à laquelle s’ajoute celle de 47 400 euros pour les meubles visait une clientèle aisée, il n’est pas établi qu’en raison du contexte économique et nonobstant les efforts des agences immobilières, la vente ne pouvait être réalisée qu’après un délai d’environ deux ans après le départ des lieux par l’acquéreur qui avait signé le compromis de vente du 26 mai 2010.

Exonération refusée.

Rares décisions dans lesquelles le juge donne raison au contribuable :

  • CAA Douai 17 mars 2022, n°19DA01635

Déménagement le 8 mars 2011, cession réalisée le 30 juin 2014.

. Sur les mandates de vente : Si le prix initialement demandé par les requérants pour cet immeuble était de 1 650 000 euros, il résulte également de l’instruction qu’en octobre 2012, peu après leur déménagement, les intéressés ont confié à deux nouvelles agences immobilières le soin de trouver un acquéreur aux prix respectifs, pour une superficie totale annoncée de 470 m2, de 1 420 000 euros et de 1 410 000 euros, ces prix étant inférieurs au prix moyen du m2 de 2 446,98 euros obtenu, selon les données fournies par l’administration, croisées avec celles produites par les requérants, lors des ventes des biens de plus 200 m2 réalisées en 2011 sur le territoire de la commune de Coye-la-Forêt. 

En décembre 2013, M. et Mme A… ont, une nouvelle fois, baissé le prix de vente auquel leur bien était proposé en le ramenant à 1 195 000 euros.

. Sur les caractéristiques du bien : En outre, si les caractéristiques particulières du bien, constitué d’une  » très grosse maison Napoléon III « , ainsi que de l’ancienne maison du gardien, étaient de nature à accroître les difficultés de revente, en particulier dans un contexte de baisse du marché immobilier sur le territoire de la commune de Coye-la-Forêt, et, par suite, à justifier une mise sur le marché à un prix de vente au m2 inférieur au prix moyen de vente des immeubles de plus de 200 m2, les requérants font valoir que la surface du bien était en réalité significativement supérieure à 450 m2, ce que corrobore l’acte de vente du 17 octobre 2000, faisant apparaître une surface hors œuvre nette de 642 m2. Ainsi, et alors même que les requérants, contraints de souscrire un prêt relais, ont finalement accepté de vendre cet immeuble en le scindant en lots, le 30 juin 2014 et le 7 janvier 2015, pour un prix total de 879 500 euros, le délai d’environ vingt mois d’inoccupation de la maison principale doit, dans les circonstances particulières de l’espèce, être regardé comme normal, compte tenu de l’état du marché, de la spécificité du bien et des diligences accomplies par les vendeurs, qui n’étaient pas tenus de chercher à le céder à vil prix. Il s’ensuit que ce bien avait conservé le caractère de résidence principale de M. et Mme A… à la date de la cession, au sens des dispositions précitées du II de l’article 150 U du code général des impôts. La plus-value réalisée par M. et Mme A… à l’occasion de cette vente ne pouvait donc être soumise par l’administration à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

  • CAA Douai 10 avril 2018, n°16DA01239

M. et Mme B…avaient mis en vente leur maison le 9 février 2011, et donné mandat à plusieurs agences immobilières les 5, 9 et 19 février 2011 pour procéder à cette vente. Le prix de vente, pour une surface habitable de 120 m², avait été fixé à 250 000 euros, soit le montant le plus bas de l’évaluation de sa valeur vénale estimée, le 22 mars 2011, à une valeur comprise entre 250 000 euros et 255 000 euros par le Crédit du Nord dans le cadre de la garantie du prêt relais accordé aux requérants, une seule agence ayant mis en vente ce bien à 259 000 euros frais d’agence inclus ; que la justesse de l’évaluation ainsi faite de ce bien est, en outre, corroborée par une autre estimation, effectuée le 8 février 2011 par une étude notariale ; que le prix de 250 000 euros était conforme à l’état du marché immobilier sur le secteur concerné

Les requérants ont baissé le prix de vente de leur bien à 235 000 euros le 30 juin 2011, à 227 000 euros le 5 novembre 2011, à 195 000 euros le 17 décembre 2012, puis à 180 000 euros le 27 février 2013 en raison de la forte baisse du marché immobilier en 2012.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. et Mme B…avaient accompli les diligences nécessaires à la vente de leur bien et qu’ainsi, le délai pendant lequel l’immeuble est demeuré inoccupé entre le 1er juin 2011, date à laquelle M. et Mme B…ont quitté les lieux et la signature du compromis de vente le 13 avril 2013, soit un délai de deux ans et deux mois, peut être regardé comme normal ; que, par suite, la cession intervenue le 16 septembre 2013 a porté sur un bien qui devait être regardé comme ayant constitué, à la date de l’opération en cause, la résidence principale de M. et MmeB.

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